La brasserie Heineken va transformer ses déchets en énergie

Heineken à Mons-en-Barœul, une brasserie moderne installée sur un site historique. Photo A.C.

Un article d'Olivier Hennion paru dans la Voix du Nord le mardi 23 juillet 2024.


Le projet Circle, qui sera mis sur pied de manière expérimentale par Idex à la brasserie Heineken   de Mons-en-Barœul d’ici à 2025, vise à transformer des déchets de production en combustible. 


Une bonne bière, c’est connu, ça peut rafraîchir (avec modération). Mais il y a plus fort : grâce au projet Circle mis sur pied de façon expérimentale par Idex et le groupe Heineken au sein de la brasserie de Mons-en-Barœul, une partie des déchets de fabrication de la bière (les drêches, lire ci-dessous) pourront bientôt fournir de quoi satisfaire plus de 50 % des besoins en énergie de l’entreprise, actuellement tributaire du gaz. « Et encore, on affiche 50 % dans le projet, mais je pense qu’on pourra atteindre les 70 % lorsque tout sera en place », affirme Thomas Noël, directeur du programme énergies renouvelables chez Heineken.


Un dispositif  de séchage des drêches unique au monde. 


Bien sûr, tout cela ne s’est pas mis en place en un jour : Heineken et Idex sont en contact depuis plusieurs années déjà. « Heineken cherchait à décarboner l’énergie utilisée pour la production de bière pour des raisons environnementales, mais aussi économiques, quand on considère les poussées récentes du prix du gaz, explique Jacky Danilo, directeur commercial grands comptes chez Idex. L’idée initiale était l’installation d’une chaudière biomasse, mais lors de nos échanges, il est apparu que la combustion des drêches pourrait être une solution encore meilleure ».


Évidemment, il a fallu trouver des solutions techniques pour que les drêches deviennent un combustible satisfaisant, et ceci sans perte de revenus pour le brasseur qui, jusqu’à présent, revend ce déchet de production de bière dans le circuit de l’alimentation animale. « Nous avons mis sur pied en partenariat avec la société Duynie un dispositif de séchage des drêches unique au monde qui permet de séparer la fibre qui va être brûlée et les protéines, qui peuvent toujours être utilisées dans l’alimentation animale », reprend Jacky Danilo.


De son côté, Heineken compte beaucoup sur cette innovation pour atteindre ses objectifs de décarbonation : « Ce projet pilote a vocation à être déployé rapidement dans les six autres brasseries du groupe, note Thomas Noël. L’objectif de Heineken étant d’atteindre la neutralité carbone d’ici à 2040 ». L’ensemble du projet a d’ailleurs reçu des soutiens financiers de l’Ademe et de la Commission européenne, dans le cadre des aides aux technologies de l’environnement.


Idex aux commandes des sites de production et de la chaudière.


Concrètement, c’est Idex qui porte le projet et construit actuellement les deux usines (l’une pour séparer les déchets de drêches des protéines selon le procédé développé par Duynie, l’autre étant une chaufferie biomasse adaptée) nécessaires au déploiement du projet Circle sur le site de Mons-en-Barœul. Heineken ne souhaite pas communiquer sur le coût du programme, mais Jacky Danilo reconnaît qu’« on parle d’un investissement se comptant en dizaines de millions d’euros ».



Image de synthèse du futur site de transformation et de combustion des drêches qui sera implanté à Mons-en-Barœul.


Le contrat prévoit qu’Idex fabrique, exploite et assure la maintenance du site pendant quinze ans. « On fournit à Heineken une solution technique clé en main, conçue avec leurs équipes, ce qui nous permet aussi d’enrichir notre panoplie de solutions de décarbonation, avec ce dispositif qui est, pour l’heure, unique au monde », résume Jacky Danilo. Le projet Circle devrait être opérationnel au deuxième semestre 2025.

 

Cartes d’identité, Idex et Heineken.

 

Le groupe Idex compte 6 100 collaborateurs, développe, conçoit, finance, construit et exploite des infrastructures énergétiques locales et bas carbone de fourniture de chaleur et d’électricité pour les bâtiments, les villes et l’industrie. Son chiffre d’affaires 2023 est de 2,3 milliards d’euros. Idex intervient de la production d’énergie thermique ou électrique à partir de ressources énergétiques locales et bas carbone (déchets, biomasse, géothermie, solaire), en passant par la distribution de cette énergie à travers les réseaux de chaleur et de froid jusqu’à son usage final au sein des bâtiments industriels, résidentiels et tertiaires.


Heineken est le deuxième groupe de brasseries au niveau mondial, avec un chiffre d’affaires 2022 de 34,6 milliards d’euros. En France, Heineken dispose de trois brasseries et figure en tête du classement des brasseurs. Heineken France publie depuis 2010 le bilan carbone de ses productions.

 

Les drêches, c’est quoi ?


Les drêches sont des résidus du brassage des céréales, issues des brasseries et des distilleries. Elles correspondent à l’ensemble des éléments non solubles qui restent après fermentation et transformation de l’amidon des grains en alcool. Les drêches sont principalement produites à partir de l’orge, du blé ou du maïs.


Jusqu’à présent, les drêches étaient vendues par les brasseurs sur le marché de l’alimentation animale, puisqu’elles sont riches en protéines. On estime que l’industrie de la bière au niveau européen produit chaque année 3,5 millions de tonnes de drêches.


Le procédé mis au point par Idex pour Heineken permet de séparer les protéines (qui sont toujours destinées à l’alimentation animale) des fibres qui, une fois séchées, fournissent le combustible utilisé dans la future chaudière biomasse de Mons-en-Barœul. O. H.